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L’Islam devient le sujet majeur du débat public français, et le principal marqueur politique, par-delà les clivages traditionnels. Depuis le discours incendiaire d’Eric Zemmour sur le sujet à la convention de la droite organisée par Marion Maréchal, le clivage s’étend dans l’opinion française entre des élites farouches hostiles au haussement de ton sur la question islamique, et une part grandissante de la population qui souhaite que la question de la compatibilité de l’Islam avec la République soit abordée ouvertement. Pas un jour ne se passe sans qu’une nouvelle polémique n’intervienne.

Peut-il exister un Islam compatible avec la République ? Cette question inimaginable il y a quelques années, dans sa crudité et sa cruauté, est aujourd’hui dans de nombreux esprits, à défaut d’avoir à ce jour le droit d’être sur toutes les lèvres. Mais le maintien d’un arrière-fond terroriste permanent (avec l’attentat de la Préfecture de police) et la montée des revendications minoritaires ont eu raison des tabous.

Macron donne le mauvais exemple sur l’Islam

Il faut dire que, sur la question de l’Islam, Emmanuel Macron lui-même a donné le mauvais exemple. Dans son retentissant discours à la Préfecture de police, il n’a pas hésité à prôner un signalement systématique des comportements de radicalisation. Problème: les symptômes de la radicalisation sont désormais entendus au sens large, et correspondent aux signaux de la conversion ou de la pratique religieuse rigoriste.

Dès lors, si l’on suit les propos de Christophe Castaner (tout de même ministre des cultes…) sur la radicalisation, la différence entre un musulman et un islamiste devient difficile à faire :

« le port de la barbe, la pratique régulière et ostentatoire de la prière rituelle, une pratique religieuse rigoriste, particulièrement exacerbée en matière de Ramadan” ou encore “le refus de serrer la main à une femme, le port du voile intégral en dehors du travail«

Au vu de cette description, plusieurs centaines de milliers de personnes peuvent être, en France, classées comme radicalisées.

En réalité, la société française, sans s’en apercevoir, est en train de mûrir une question simple : l’expression de l’Islam dans l’espace public est-elle compatible avec la République ? On n’en est pas encore à poser la question aussi ouvertement, mais les jours passants, nul doute que la question devrait être, assez rapidement, formulée aussi clairement.

Des polémiques en veux-tu ? en voilà !

Cette lente maturation du débat public se fait à coups de polémiques de plus en plus violentes. Au chapitre de ces moments qui secouent, on rangera cette semaine les propos de Xavier Bertrand, particulièrement tranchants devant la presse.

 J’appelle à une offensive républicaine » contre « l’islamisme qui gangrène notre pays », a affirmé Xavier Bertrand, pour qui « l’islam politique est un danger majeur qui remet en question les fondements de notre société ».

Si le mou du genou Bertrand en arrive là, c’est bien que plusieurs étapes décisives ont été franchies dans ce qui ressemble de plus en plus à une conscientisation d’un problème largement dû aux financements saoudiens ou qataris, et à l’intervention américaine dans notre champ communautaire.

En même temps, un conseiller régional RN de Franche-Comté suscitait une violente polémique en publiant sur les réseaux sociaux une vidéo montrant comment il avait demandé l’expulsion d’une femme voilée qui assistait, dans le cadre d’une sortie scolaire, à une réunion du Conseil. Cette sortie lui a valu les pires noms d’oiseaux.

Vers un retour de Daesh et des attentats ?

Bien entendu, derrière ces éléments épars qui témoignent d’une fébrilité certaine de la société française, toute la question est de savoir si ces heurts verbaux risquent de se traduire par des heurts physiques. On peut sur ce point être assez pessimistes si l’on songe aux évasions ou libérations annoncées de suppôts de Daesh en Syrie. Détenus depuis plusieurs mois par des Kurdes, ces combattants ou proches de combattants pourraient retrouver la liberté à l’occasion de l’offensive turque.

Un premier camp de 800 prisonniers serait déjà libéré.

Il faut donc s’attendre, dans les semaines à venir, à des retours clandestins de combattants sur le sol français, et vraisemblablement à une reprise des attentats. Nul ne sait sur quelle extrémité une nouvelle vague sanglante pourrait déboucher dans le climat actuel.

source:Le courrier des stratèges